jeudi 18 novembre 2021

La butte Malakoff (commune de Saint-Etienne-de-Vicq) : un acte de foi dans le bonapartisme

Le Bourbonnais est traditionnellement décrit dans l'historiographie nationale comme une terre très tôt gagnée aux idées démocrates. Cependant, à l'intérieur de ces Campagnes rouges bourbonnaises, il subsista (et il subsiste encore) des "poches" conservatrices dont l'exemple le plus parfait est sans nul doute la Montagne bourbonnaise. A une échelle plus fine, celle du village, l'analyse historique permet de relativiser la vision globalisante des grandes synthèses de sociologie politique. Il en va ainsi de l'état d'esprit qui régnait dans la commune de Saint-Etienne-de-Vicq au milieu du XIXe siècle.
Le site a été érigé sous le mandat de François Péturet, premier magistrat de la commune de 1839 à 1869, ancien soldat d’Austerlitz et médaillé de Sainte-Hélène. Les archives font état des sentiments passionnément bonapartistes de la population. Cette tendance ne fera que s’affirmer puisque le prince Louis-Napoléon, largement majoritaire dès l’avènement de la deuxième république en 1848 recueille un oui massif (195 oui sur 195 votants) au plébiscite qui ratifie le coup d’état du 2 décembre 1851 et 205 oui sur 205 votants à celui organisé en faveur de l’Empire. La butte de Malakoff constitue un témoignage de reconnaissance des habitants de St-Etienne-de-Vicq aux soldats de l’armée d’Orient commandée par le général Pélissier, après la chute du fort de Malakoff et la prise de Sébastopol pendant la guerre de Crimée.
Extrait du registre des délibérations : L’an mil huit cent soixante deux, le 8 du mois de mai, le conseil municipal de la commune de Saint-Etienne-de-Vicq assemblée au lieu ordinaire de ses séances sous la présidence de Monsieur Péturet, maire, pour la tenue de la session du 8 courant ensuite de la convocation faite par Monsieur le maire de la dite commune le 2 du dit mois. Présents : Mrs Péturet, maire, Geneste, adjoint, Péturet fils, Auroux, Fournier, Combaret, Chevalier, Fournier, Maridet et Devaux. Absents : Mrs Charasse, Belot, Millet. Lesquels forment la majorité du conseil en exercice et peuvent délibérer d’après les termes de l’article 7 de la loi du 5 mai 1855. Monsieur le président a ouvert la séance et a exposé ce qui suit : Le dimanche 16 septembre 1855, les habitants de Saint-Etienne-de-Vicq se trouvaient réunis autour de leur maire pour entendre la lecture de la dépêche qui annonçait la prise de Sébastopol. Cette lecture fit naître chez eux un enthousiasme indescriptible qui se traduisit par des cris répétés de « vive l’Empereur ». Le maire ayant fait la proposition de perpétuer ce glorieux fait d’armes, en élevant une butte sur la montagne du parc, dans un terrain lui appartenant qu’il affectait à cet objet, cet avis fut adopté unanimement et chacun s’offrit à concourir de ses bras et de ses moyens, à l’accomplissement de cette œuvre patriotique. Conformément à cette résolution la butte s’est élevée et le maire ne peut donner que des éloges à tous les bons citoyens qui sont venus apporter leur concours à cette œuvre patriotique, mais on ne peut se dissimuler qu’il reste encore quelque chose à faire et que la butte n’a pas encore atteint la hauteur convenable. Il resterait aussi après son achèvement, à la surmonter d’un étendard et d’une croix, avec inscription portant ces mots ; Malakoff 8 –7bre 1855 – à l’Armée Française d’Orient. L’Empereur doit, dit-on venir à Vichy au mois de juillet prochain. Peut-être aurions-nous quelque chance de l’attirer jusqu’à Saint-Etienne-de-Vicq, si nous pouvions lui offrir de visiter notre butte, témoignage du patriotisme des habitants qui ne pourrait manquer de lui être agréable. En conséquence, j’ai l’honneur de vous proposer de voter un secours de la somme que vous jugerez à propos pour l’achèvement de la butte de Malakoff. Avec une modique somme de 40 francs, je pense qu’il serait possible d’élever la butte à une hauteur de 20 pieds et de faire les autres travaux nécessaires. En conséquence, le conseil après en avoir délibéré a été d’ avis de voter la somme de 40 francs sur les fonds qui se trouvent disponibles sans destination sur les budgets de 1862 en additionnel du même exercice et employé selon la délibération qui précède.
Ont signé : Mrs Geneste, Auroux, Fournier, Chevalier, Fournier, Devaux, Péturet fils et Péturet maire.
Ont déclaré ne le savoir Mrs Combaret et Maridet.
 
La butte Malakoff constitue un exemple unique de ferveur bonapartiste 
 
S. HUG

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