vendredi 17 juillet 2009

Le Breuil : la porte de la montagne

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Après les Arnefauts, la route menant de Lapalisse au Breuil devient peu à peu plus sinueuse et prend un tour plus montueux : encore quelques kilomètres et la montagne bourbonnaise sera là. Sur cet itinéraire décrit en son temps par le chanoine Côte, Le Breuil est plus qu'une étape, c'est la porte d'entrée de la MONTAGNE.




La petite chapelle romane Notre-Dame-et-Saint-Blaise du XIIe siècle est sans aucun doute la pièce maîtresse du patrimoine architectural de la commune du Breuil. Eglise paroissiale jusqu'en 1911, cette chapelle servit par la suite de dépôt avant d'être restaurée par la municipalité.







Dans le choeur de cette chapelle se trouve le tombeau (1300) d'Alix de Breuil, femme d'Aycelin, seigneur de Montgilbert. La défunte est représentée sur la dalle, mains jointes et pieds reposant sur un chien, symbole médiéval de la fidélité conjugale.




Tombeau d'Alix de Breuil (clichés Ministère de la Culture)


Au coeur du village se trouve la Maison Regnault, une ancienne maison des dîmes qui possède une tour carrée flanquée d'une petite tour ronde et d'une porte Renaissance portant les armes de la famille de Vienne.



Le vieux château du Breuil disparut très tôt, sans doute au cours du XIIIe siècle. Ce fut d'ailleurs sur sa motte féodale depuis longtemps désertée que l'on édifia, au début du XXe siècle, la nouvelle église de la paroisse. Pour pallier l'absence d'un véritable édifice castral, marque de pouvoir, l'administration seigneuriale locale choisit d'installer dans les murs de la maison Regnault à la fois son organe de justice et sa grange aux dîmes (aujourd'hui disparue). La famille Regnault résida dans cette demeure au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. Il s'agissait d'une lignée de "potentats locaux" à la fois notaires, fermiers de seigneuries et officiers seigneuriaux.





S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com

mardi 14 juillet 2009

Bien plus qu'un recueil de souvenirs, un véritable manifeste pour le gai passé

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Gisèle Gaston, cheville ouvrière de l'association bellerivoise LA MEMOIRE DU BOURBONNAIS, a récemment publié un recueil intitulé Souvenirs bourbonnais, entre Forterre et Val de Besbre, entre 1950 et 1960. Cet ouvrage mériterait à plus d'un titre de trôner dans la bibliothèque de tous ceux et de toutes celles qui se passionnent pour notre province. Gisèle Gaston restitue avec brio l'atmosphère qui régnait durant son enfance dans le hameau de Coutant, sur la commune de Tréteau. Si l'espace social de la jeune Gisèle est alors dominé par le cadre familial et par l'école, l'ailleurs fait fréquemment irruption dans l'univers de la fillette par le biais du métier du père qui est camionneur, ce qui lui permit, à l'occasion de certaines tournées, de découvrir la Grande bleue, Marseille et Saint-Tropez... L'une des grandes originalités du travail de Gisèle Gaston est de nous offrir une écriture très féminine, une véritable rareté. Deux exemples parmi d'autres. Sous sa plume, fait unique, la saison hivernale est enfin féminisée ("Dame Hiver"). Au temps liturgique et scolaire des gamins de l'après-guerre, Gisèle Gaston rajoute une perception calendaire reposant sur un temps culinaire (les crêpes, les bignons, les produits de la chasse automnale...). Et puis, au creux de cet ouvrage se niche quelques madeleines de Proust, ces petites choses apparemment anodines qui possèdent le pouvoir discret de vous transporter en quelques secondes au plus profond de vos souvenirs d'enfance et de retrouver fugacement la chaleur de la brique de la grand-mère glissée entre les draps froids ou le plaisir chaque fois renouvelé de feuilleter le catalogue du Familistère (de la Manufrance pour d'autres...). Gisèle Gaston revendique en effet le droit d'écrire sa vision joyeux du passé. Il flotte dans cet ouvrage l'esprit lumineux des Enfants du marais de Jean Becker.


Pour mieux découvrir l'auteur des Souvenirs bourbonnais, voici quelques questions que nous lui avons posé pour le compte du site PALICIA :


L'écriture de soi passe-t-elle pour vous par l'expression affirmée d'une mémoire féminine, grande absente de l'histoire ?

Dans un premier temps je n’avais pas écrit ces pages pour les publier, je voulais seulement laisser un témoignage pour mes petits enfants. En regardant autour de moi dans les salons, j’ai vu beaucoup de biographies plus ou moins romancées, et tristes dans la plupart des cas, ou encore ces écrits sont une thérapie pour leur auteur ; et la n’était pas du tout mon objectif (de faire pleurer dans les chaumières). La gente masculine est bien représentée, et l’histoire d’une femme ayant vécue une très belle enfance pour les années décrites me paraissait une évidence. C’est vrai que ce livre une fois terminé me paraissait trop intime, trop personnel. J’ai eu une hésitation a le sortir, et puis : « on verra bien ! » Un petit tirage de 100 exemplaires pour commencer, qui sont partis en 3 dédicaces. Un retirage a vite été commandé.

Existe-t-il un lien entre votre parcours professionnel et votre soif d'écrire et de raconter ?

Le métier d’infirmière en psychiatrie est principalement basé sur le contact avec l’autre. Discuter, parler, questionner, observer, écouter surtout, faire des rapports oralement et écrits avec l’équipe soignante, les médecins, les psychologues, les assistantes sociales …
En dehors de mon travail, j’ai fait du théâtre qui m’a beaucoup apporté, les improvisations et l’écriture de petites pièces ont été pour moi un vrai bonheur.
Dans ma famille, chaque fois qu’un évènement est à fêter je fais un discours, donc recherche sur la personne et écriture de quelques pages retraçant sa vie, des anecdotes…encore le week-end dernier pour les 50 ans de ma belle-sœur en Belgique je lui ai offert un petit ouvrage agrémenté de photos inédites !

Pouvez-vous nous présenter en quelques mots l'association Mémoire du Bourbonnais ?

Cette association a été créée en octobre 2000, son but : rechercher, sauvegarder et transmettre les savoirs de nos ancêtres dans le Bourbonnais.
1er ouvrage : métiers du monde rural (G.Gaston) avec 50 métiers disparus ou presque
2e ouvrage : vieux métiers de nos aïeux en Bourbonnais (écrit avec un membre de l’association) 140 métiers
Une vraie passion pour les vieux métiers puisque je possède une collection d’outils, d’objets et de linges anciens
Dans les expositions notre stand est agrémenté de vieux outils, de pots de confiture, de casseroles en cuivre, tout cela ayant un lien avec les livres présentés.
28 livrets de cuisine d’autrefois ( les pâtés, le gibier, les confitures, les boissons, les soupes, les repas de fête….), 2 livrets sur les plantes et les remèdes d’antan, 1 sur les trucs de la maison et du jardin, 1 livret de poésies et histoire en patois bourbonnais, 1 livre de contes anciens. Mais aussi des conférences sur les vieux métiers avec 250 photos anciennes sur DVD et une animation sur le patois sont proposées dans les médiathèques, les maisons de retraite, les écoles, les comités des fêtes…(la médiathèque de Lapalisse nous a reçu lors de deux conférences cette année)
Dix membres représentent l’association. Une seule plume : la mienne. Un autre auteur a quitté l’association.


Comment définiriez-vous l'identité de notre province ?

Notre province du Bourbonnais est la plus belle puisque c’est la nôtre !!!!! Le Bourbonnais est un ancien duché et a une Histoire avec les Bourbon, les villes de Bourbon l’Archambault et Moulins en sont le témoignage. Vichy, ville thermale, a une histoire également avec Napoléon III. Le Bourbonnais est un fief, cossu, aux paysage multiples : plaine de Limagne, bocage, sologne, montagne bourbonnaise. Le Bourbonnais garde avant tout son identité et ne s’intègre « pas » dans l’Auvergne. Les Bourbonnais se disent Bourbonnais et non Auvergnats !
Le Bourbonnais est accueillant puisqu’il dit ‘bonjour par devant et par derrière’ avec son chapeau aux 2 bonjours. Chapeau que l’on trouve uniquement en Bourbonnais.

Le site de l'association MEMOIRE DU BOURBONNAIS : www.memoire-du-bourbonnais.com
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Pour contacter Gisèle Gaston et se procurer son ouvrage : gaston.gisele@wanadoo.fr
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Le 21 août, à Lapalisse, dans le cadre de la journée « Flâneries au château » autour des thèmes de l'artisanat d'art et des vieux métiers, venez découvrir le stand de l'association MEMOIRE DU BOURBONNAIS entre 10h et 22h.


S. HUG

mercredi 8 juillet 2009

L'histoire discrète de Servilly


Le site primitif de Servilly était situé à 800 mètres du bourg actuel, sur une motte féodale qui se dressait tout contre le domaine des Pérards. Un hôtel fort couronnait ce système défensif. Une chapelle castrale et un petit cimetière complétait l'enclos seigneurial qui, de toute évidence, fut endommagé à plusieurs reprises lors de la guerre de Cent ans. Ce ne fut qu'au tout début du XVIIe siècle qu'une nouvelle église paroissiale fut construite dans le bourg à partir, semble-t-il, d'éléments préexistants.



Durant plusieurs siècles pour la très grande majorité des habitants de Servilly le CHATEAU et la PROPRIETE étaient confondus dans la terre de Gléné. Remanié notamment au cours du XVIIIe siècle, le château de Gléné, qui dépendait avant la Révolution de la paroisse de Lubier-La Palisse, conserva ses deux grosses tours du XIVe siècle. L'histoire de Gléné est plutôt difficile à reconstituer tant elle fit l'objet de nombreuses transactions. Propriété entre le XIVe et le début du XVIe siècle de la famille Villars, originaire de Floret, Gléné fut vendue en 1525 à Antoine de Chabannes, évêque du Puy, frère du Maréchal. En 1531, notre évêque donna cette terre à son neveu par alliance, Pierre de Martinières, seigneur d'Isserpent. En 1548, Pierre de Martinières vendit Gléné à un cousin, Charles de Chabannes que ses descendants conservèrent jusqu'à la fin du XVIe siècle. Au XVIIe siècle, la terre de Gléné revint dans les mains de la famille de Villars avant d'être une nouvelle fois revendue aux Nepveu, seigneurs de la Tour-Pourçain (Barrais-Bussolles). Après avoir appartenue aux Morigny, une famille de la robe moulinoise, Gléné échut aux Rollet d'Avaux, magistrats riomois. Le couple de châtelains fut arrêté lors de la Révolution, jugé et guillotiné le 15 mai 1794. Gléné fut alors confisquée et vendue comme Bien national. Les Maridet, de gros propriétaires fonciers, s'en rendirent acquéreurs et l'a conservèrent jusqu'à la fin du XIXe siècle. Peu avant la Grande Guerre, Gléné fut vendue au Comte Jaquelot de Potier. De nos jours, si l'essentiel des anciennes terres dépendant de Gléné appartiennent encore à la famille Jaquelot, le château appartient quant à lui au chercheur suisse Andreas Muller, spécialiste européen des crop circles, ces mystérieux cercles de culture.


Même si le bourg de Servilly a toujours été à l'écart des grandes routes, il possédait encore dans les années 30 trois bistrots, deux charrons, deux épiciers et deux maréchaux-ferrants. Deux foires s'y tenaient également.


Parmi tous les commerces du bourg, le café Besson était une véritable institution.


Une vue de la place de Servilly dans les années 40

Vision champêtre du puits du bourg dans les années 30.

S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com

mercredi 1 juillet 2009

Saint-Prix existe !

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C'est avec la commune, si proche et si méconnue, de Saint-Prix que nous ouvrons notre tour estival du Pays lapalissois.
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Saint-Prix serait-elle seulement, comme on peut le lire parfois, la « banlieue verte » de Lapalisse ? Répondre à cette question reviendrait à évoquer par le menu l’histoire des relations, parfois tendues, entre ce village et sa voisine qui s’est toujours empressée de lui clouer le bec en lui rappelant son statut de VILLE. Et pourtant, ce village existe bel et bien. Il n’y a bien que nous autres Lapalissois pour prétendre que son territoire peut être embrassé le temps d’une ballade dominicale décidée après le café, histoire de monter à Beaulieu et de redescendre par les Jeanrais ou la Gare afin de regagner au plus vite les bords de Besbre.
Cette commune mérite mieux qu'une traversée, prenons le temps de regarder Saint-Prix et de bambocher dans sa campagne.
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Dans les années 30, Saint-Prix possédait encore quatre bistrots, trois épiceries-merceries, deux charrons, deux tailleurs et trois moulins. Alors que la fête patronale battait son plein le 15 août (avec le traditionnel pélerinage de Beaulieu), le quartier de la gare possédait également sa propre fête le lundi de Pâques.


Au siècle dernier, le temps long de la ruralité était accéléré par le passage de la route de Paris à Lyon (future Nationale 7) par l'exploitation des carrières de granit et par l'usine de boutons du Viaduc.



C'est à l'écart du bourg qu'il faut aller débusquer le passé lointain de Saint-Prix. Sur le plateau de Beaulieu se dresse une petite chapelle (la CHAPELLE devrais-je dire) du XIIe siècle abritant une statue miraculeuse de Notre-Dame de Bon-Secours. Selon la légende, au XIIe siècle, les chevaux de deux cavaliers passant par ce plateau s'arrêtèrent net tout tremblants au pied d'un chêne. En levant les yeux, les deux cavaliers aperçurent entre les branches, dans un halo de lumière, une statue de la Vierge tenant l'Enfant Jésus. La population accourut alors à Beaulieu et décida, sous la conduite du desservant de la paroisse, de transporter cette statue au bourg. Cependant, le lendemain matin, la Vierge à l'Enfant était à nouveau miraculeusement perchée en haut du chêne de Beaulieu. Peu de temps après, le sire de Montjournal décida d'édifier sur le site même de la découverte la chapelle que nous connaissons encore. (voir également l'article de PALICIA consacré à la Piété en Pays lapalissois, archives du mois de mai 2009).

Jusqu'à la veille de la Seconde guerre mondiale, on présentait dans la hâte à Notre-Dame du Bon-Secours les nouveaux-nés souffreteux dans l'espoir de leur accorder le souffle de vie nécessaire pour recevoir le baptême et éviter ainsi le séjour des limbes.


Sur les bords de la Besbre, enfoncé dans la verdure, se niche le Châtelard, un hameau dominé par un vieux moulin en activité jusqu'à la veille de la Première guerre mondiale. A l'époque médiévale, le Châtelard était, comme son nom l'indique, un petit fief seigneurial ayant pour mission de contrôler un point de passage important sur la Besbre.

Le moulin du Châtelard au début du XXe siècle



Aux Toquins, une vieille tour accolée à un corps de ferme témoigne encore de l'existence d'une terre seigneuriale.


Les Toquins, croquis des Fiefs du Bourbonnais


Saint-Prix est enfin une terre de caractère où un certain esprit de résistance sommeille. Deux anecdotes. Lors de la Révolution, une mère Bert, de son vrai nom Giraud, cacha dans son lit la statue de Notre-Dame de Bon-Secours de Beaulieu afin de la soustraire au bûcher des Bonnets rouges. A la fin du XIXe siècle, une lutte sourde opposa pendant plusieurs années la municipalité de Saint-Prix à la famille Noailly, propriétaire de la terre de L'Hermitage. Cette famille, l'une des plus fortunées du Bourbonnais, souhaitait s'établir sur les bords de Besbre et avait commencé à rassembler plusieurs parcelles, dessiner un parc arboré derrière de hauts murs et édifier un ensemble de bâtisses à caractère bourgeois connues sous l'appellation de Pavillon. Afin de "gâcher" le paysage qui s'offrait au regard des Noailly du haut de leur belvédère, la municipalité de l'époque n'hésita pas à installer le nouveau cimetière communal sur la colline qui se dressait en vis-à-vis de l'autre côté de la besbre... Peu de temps après, une cuisante défaite lors d'élections municipales blessa la morgue des Noailly qui, de guerre lasse, finirent par vendre leur propriété.




S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com