samedi 19 septembre 2009

En point d'orgue : la catastrophe du dirigeable République

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L'Illustration du 2 octobre 1909 - Dessin établi à partir du récit des témoins du drame

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Dans une lettre datée du 26 septembre, Léonie Fradin, épouse de Paul Raby, architecte de la Ville de Lapalisse, raconte à son fils Marcel le dernier vol du dirigeable République :


"Maintenant, mon cher Marcel, que je te raconte l’épouvantable catastrophe du dirigeable que tu liras avec plus de détails dans tous les journaux.
Hier, samedi à 4h1/2 du matin nous entendons un camion automobile rouler dans les rues ; je dis à ton père : « c’est au moins le ballon qui part aujourd’hui, car les autres jours ils ne sont pas si matinals (sic) » ; aussitôt le jour arrivé nous montons au grenier et apercevons le hangar ouvert. Comme je tenais essentiellement à le voir partir, avec ta sœur, nous nous habillons à la hâte et montons au hangar ; le ballon était en effet sorti et prêt à partir. Le capitaine Marchal, le lieutenant Chauré et les deux adjudants Vincenot et Réaux montent dans la nacelle et font leurs préparatifs de départ. Quelques instants après le dirigeable s’élève gracieux et majestueux dans le ciel bleu. La foule applaudit, les aéronautes répondent par des signaux, le képi à la main, l’un même agite un mouchoir en signe d’adieu. Jamais nous n’avons vu le ballon d’aussi près ; aucun des détails ne nous a échappé. Charles qui se trouvait auprès de nous, nous a donné toutes les explications désirables. Tant que nous avons aperçu le ballon nous l’avons suivi des yeux ; puis une fois qu’il a eu disparu à nos regards, nous nous sommes décidés à descendre. Une heure après ils étaient à Moulins où une ovation des plus enthousiastes lui a été faite. Mais hélas à 8 heures ½ , à Trévol, devant le château d’Avrilly qui appartient à M. de Chabanne La Palice, cousin du marquis, se produit l’épouvantable accident qui devait coûter la vie aux quatre malheureux qui le montaient.
Une pale d’hélice se détache et est projetée par la vitesse dans l’enveloppe qu’elle traverse de part en part ; une explosion se produit et le ballon de 200 mètres d’altitude tombe sur le côté de la route, ensevelissant sous ses débris dans la nacelle les quatre malheureux officiers. La pale a été retrouvée dans un arbre à 100 m de l’accident avec un lambeau de l’enveloppe du ballon. Aussitôt les spectateurs qui se trouvaient là se mettent en devoir de dégager les malheureux. Tous étaient morts. Le capitaine Marchal avait un trou dans la tête causé par un tube et le cerveau sortait, le lieutenant avait également des blessures à la tête ; quant aux deux adjudants, il a fallu un temps infini pour les dégager de dessous le moteur qui les avait broyés. Tu vois mon cher Marcel, quelle triste fin. Ils n’ont, parait-il, pas souffert physiquement, ayant été tués sur le coup, mais ils se sont vus perdre. Ici tout le monde est dans la consternation ; les drapeaux sont en berne et nous revenons à l’instant d’un service funèbre dit à leur intention dans l’église de Lapalisse.

Ta lettre nous est parvenue ce matin …..Envoie nous de tes nouvelles le plus tôt possible. Ci-joint ton mandat.

Toute la famille se joint à moi pour t’embrasser bien fort.

Ta maman qui t’aime bien.

Léonie"





A Versailles, dans la cour de la caserne du Ier Génie - départ du cortège funèbre pour la cathédrale où se déroula une messe lors de des funérailles nationales de l'équipage du République.

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Remerciements à M. Zaccone, descendant du couple Fradin-Raby, pour son aide documentaire.


S. HUG


HUGSTEPHANE@aol.com

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