jeudi 22 octobre 2009

L'abbé Gabriel Déret

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Pendant près de trente deux ans, l'abbé Déret incarna l'Église à Lapalisse. De nombreux Lapalissois se souviennent encore de ce prêtre d'exception qui avait gardé de son engagement militaire une certaine allure martiale. Fustigeant souvent lors de ses sermons la perte des valeurs chrétiennes et l'effritement de la cellule familiale, je le vois encore venir chercher par les oreilles, et cela en plein office, les jeunes ouailles trop peu attentives à son goût pour les placer près de l'autel... Homme animé d'une vraie bonté, participant à de nombreuses sociétés lapalissoises, l'abbé Déret fut un trait d'union entre l'Eglise de l'avant-Vatican II et celle de l'ouverture sur le monde moderne.

Gabriel Déret était né à Cosne-d'Allier en 1910. Sa prime jeunesse fut marquée par la Grande Guerre qui lui arrivait d'évoquer en chaire. Entré à l'Institution du Sacré-Coeur en 1923, puis au Grand Séminaire de Champfeu en 1927, il fut ordonné prêtre en 1934. Tout d'abord professeur à l'Institution du Sacré-Coeur, il devint ensuite vicaire à Gannat. En 1939, Gabriel Déret choisit de s'engager dans l'armée et devint officier avant d'être blessé et envoyé en Allemagne en captivité. A la Libération, il devint curé de Jenzat, puis curé-doyen de Jaligny en 1947. En 1954, il devint enfin curé-doyen de Lapalisse.

Gabriel Déret en 1939





L'abbé Déret et les communiants de 1957

(cliché aimablement communiqué par Jean-Pierre Chervin)


Décoré de la Légion d'Honneur et de la Croix de Guerre, l'Abbé Déret fut Président cantonal des Anciens Combattants Prisonniers de Guerre et Président national des Prêtres anciens combattants. Une semaine après avoir célébré sa messe d'adieu et alors qu'il s'apprêtait à quitter sa chère ville de Lapalisse pour prendre une retraite bien méritée, Gabriel Déret fut terrassé par une crise cardiaque le 26 juillet 1986.

Deux souvenirs personnels : sa messe de jubilé, célébrée en 1984 où son charisme illumina toute l'assistance et la visite impromptue, un soir de kermesse, de son petit musée religieux aménagé tout contre la chapelle de l'école Notre-Dame, collection qu'il légua d'ailleurs juste avant sa mort à la Société d'Emulation du Bourbonnais et aujourd'hui visible au Musée Bourbonnais de Moulins.




L'abbé Déret dans les années 60



A voir sur le site de la ville de Lapalisse : les pages consacrées au musée des drapeaux du Monde, collection patiemment réunie par l'abbé Déret





S. HUG


HUGSTEPHANE@aol.com

samedi 17 octobre 2009

Le bonheur de l'historien

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Le 11 octobre dernier, dans la salle Carrefour de Positions de Bransat, Marie-Madeleine Richard reçu des mains de Jean Cluzel, secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences morales et politiques, le Prix Allen dans la catégorie du Mémorial communal pour "Chronique d'un village, Andelaroche au XXe siècle". Si le Prix Allen récompense malheureusement trop souvent des ouvrages se prétendant historiques et qui ne sont en fait qu'une simple compilation érudite, cette fois-ci, le Prix distingue un ouvrage collectif d'une rare perfection. Aux côtés de Marie-Madeleine Richard, cheville ouvrière de ce projet, une soixantaine d'Andais collectèrent pendant de longs mois souvenirs, anecdotes et documents iconographiques afin de réaliser la somme mémorielle la plus complète de notre province. Cet ouvrage mériterait d'être connu par l'ensemble des ruralistes français car il s'agit d'un outil de travail de première main permettant de mesurer, à l'échelle de la longue durée, l'importance des grandes ruptures et des petites respirations qui ont jalonné le passage des sociétés traditionnelles aux sociétés modernes.

Chronique d'un village est enfin une vraie leçon de vie pour nous autres historiens qui avons souvent tendance à trop conceptualiser nos lectures du passé en nous réfugiant derrière un jargon épineux. Ces Andais nous ont ramené aux sources de l'histoire : tout simplement le récit du passé, un vrai bonheur.



S. HUG


HUGSTEPHANE@aol.com

jeudi 8 octobre 2009

Le refuge polonais d'Isserpent

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Durant l'été, Madame Noélie Morlat, dont le café-restaurant anima pendant de longues années la place d'Isserpent, me parla d'une demeure cossue du bourg, connue sous le nom de La Réserve ou de La vieille Poste qui aurait été construite par un réfugié polonais au cours du XIXe siècle.

L'archiviste de la Bibliothèque polonaise de Paris aiguilla immédiatement mes recherches sur le Baron Napoléon-Ignace Gostowski dont le destin vaut le détours.





La demeure du Baron Gostowski à Isserpent fut le siège de la Poste du village entre 1898 et 1910 (d'où le nom de Vieille Poste). Le Comte Thiollière, propriétaire du château de Beauplan, avait acquis cette bâtisse à la fin du XIXe siècle et en avait fait le grenier à grains de ses vastes propriétés (d'où le nom de Réserve).
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Napoléon Ignace GOSTKOWSKI (baron von Gostkowski) naquit à Cracovie en Pologne le 2 août 1807. Issu d’une vieille famille noble, il entra à l’Ecole militaire en 1825. En 1830-1831, il prit part à l’insurrection polonaise contre la domination russe. Il reçut la Croix d’or militaire polonaise en mars 1831 après la bataille de Grochow et fut nommé major en août de la même année. A l’automne 1831, l’insurrection polonaise fut écrasée par l’armée russe, Napoléon Ignace Gostkowski prit alors le chemin de l’exil en direction de la France. Il fut affecté, en 1832, au dépôt des réfugiés polonais établi à Bourges.

A une date inconnue, notre homme quitta le métier des armes pour effectuer une reconversion réussie dans l’encadrement de l’administration locale des Ponts et Chaussées en devenant agent voyer (l’équivalent de nos jours d’ingénieur de la DDE).

Ce fut de toute évidence entre 1833 et 1837 que Napoléon Ignace Gostowski fit construire une demeure de type « bourgeois » dans le bourg d’Isserpent. Le maire de l’époque, Jean-Baptiste Michel, riche propriétaire terrien (la troisième fortune du canton), ancien chirurgien de la Grande Armée, bonapartiste notoire et franc-maçon moulinois (à cette époque, les réseaux maçonniques sont constamment venus en aide aux réfugiés politiques européens : Espagnols, Italiens, Grecs et Polonais notamment), semble avoir bien servi les intérêt du jeune baron polonais dans cette affaire. Nous ignorons malheureusement tout des conditions d’acquisition du foncier et de la cession ultérieure de ce bien.


En 1837, Gostkowski épousa, dans le Cher, Laurence Archambault des Chaumes (1817-1890) qui fut parfois appelée baronne Gostkowska. Napoléon Ignace Gostkowski ne fut naturalisé français qu’au printemps 1848, à cette époque il était en poste dans le département de la Nièvre.
Napoléon Ignace Gostkowski décéda le 10 mars 1881 à Issoudun (Indre).


S. HUG