mercredi 23 mars 2011

COLLECTION VISAGES DU BOURBONNAIS - L'épopée des Ducs de Bourbon

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Le Bourbonnais est la seule province de France à reposer entièrement sur une construction politique édifiée au temps de la féodalité, c’est-à-dire entre le Xe et le XVe siècle. Le berceau de la dynastie des Bourbon se situe au nord de l’actuel Bourbonnais, dans la région de Souvigny, aux confins de l’Auvergne, de l’Autunois et du Berry. Cette situation marginale favorisa l’expansion des sires de Bourbon. Autour de 915, un nommé Aimard, sans doute viguier (= sergent) de Deneuvre pour le Comte d’Auvergne fit don à l’abbaye de Cluny d’une villa (= exploitation agricole) à Souvigny. (ci-dessus : ruines du château du Bourbon-L'Archambault au début du XXe siècle)

A la fin du XIe siècle, les sires de Bourbon devinrent les avoués (= protecteurs temporels) du prieuré de Souvigny (photo ci-contre de l'église Saint-Marc) qui les soutint spirituellement et financièrement dans leur expansion territoriale. La puissance clunisienne se montra d’ailleurs extrêmement bienveillante vis-à-vis de la politique féodale des sires de Bourbon. Autour de 953, les sires de Bourbon prirent possession du château de Bourbon (actuel Bourbon-l’Archambault). L’affaiblissement politique des Comtes de Bourges et des Comtes de Nevers permit à la dynastie bourbonnienne de s’étendre au cours du XIe siècle à partir de l’axe Souvigny-Bourbon. L’alliance avec la dynastie capétienne devint une réalité à la fin du XIe siècle et en 1120, Archambaud VII épousa la belle-sœur du roi, Agnès de Savoie. Dès lors, les sires de Bourbon furent de fidèles vassaux des rois de France et entreprirent de s’étendre vers le sud, en direction de l’Auvergne, afin de créer une marche face aux Plantagenêts. De 1198 à 1213, Gui de Dampierre, un seigneur champenois qui avait épousé Mahaud, la petite-fille d’Archambaud VII, fit la conquête de l’Auvergne au nom du roi. Pour le récompenser, Philippe Auguste lui donna en 1202 l’importante seigneurie de Montluçon. Au cours du XIIIe siècle, les Bourbon prirent pied sur la rive droite de l’Allier en prenant possession de Varennes, de Billy et de Lapalisse. En 1276, l’héritière des terres des Bourbon, Béatrice, épousa Robert de Clermont, sixième fils de Saint Louis. Robert apporta avec lui son comté de Clermont en Beauvaisis et resserra encore un peu plus les liens unissant les Bourbon aux Capétiens. Les Bourbon étaient désormais des pièces maîtresses sur l’échiquier politique du royaume. Les deux successeurs de Robert de Clermont et de Béatrix, Louis Ier et Pierre Ier servirent fidèlement les intérêts du roi et, en 1327, Charles IV érigea en duché la vieille baronnie de Bourbon. Le principat du duc Louis II (1356-1410) fut l’un des plus importants tant au niveau territorial qu’en termes d’organisation administrative. Pourtant, tout avait plutôt mal débuté. Retenu otage à Londres entre 1360 et 1366, afin de garantir la bonne exécution du Traité de Brétigny, Louis II dut à son retour libérer son duché des bandes de routiers et d’Anglais qui occupaient encore une douzaine de places-fortes. Grâce à son mariage en 1371 avec Anne Dauphine (= du Dauphiné d’Auvergne dont la petite capitale historique est la ville de Billom), Louis II put rattacher à son duché la châtellenie de Thiers. L’année suivante, le Forez rendra dans le giron des Bourbon, acheta la Combraille, mit la main sur la ville de Vichy et rattacha enfin en 1400 le Beaujolais à sa construction princière. Afin de centraliser l’administration de ses terres, Louis II créa en 1374, une Chambre des Comptes ducale.


Lors de la rivalité entre la France delphinale et les territoires bourguignons (1410-1435), les Bourbon, tout en soutenant les intérêts du dauphin (= futur Charles VII), choisirent d’adopter une attitude prudente. Cette politique fut finalement récompensée car en 1425 l’Auvergne fut rattachée aux possessions des Bourbon. En 1440, le duc Charles Ier participa à la Praguerie, une rébellion des grands feudataires du royaume contre le centralisme monarchique. En quelques semaines, les troupes royales prirent tout le sud du Bourbonnais et conduisirent le duc à signer la Paix de Cusset. En 1465, le duc Jean II se lança à son tour dans un nouvel épisode de révolte connu sous le nom de Ligue du Bien Public. A Jean II, succéda son frère Pierre II (1488-1503) qui fit recueillir les coutumes juridiques du Bourbonnais et les fit rédiger (1500). Sous Jean II et Pierre II, la cour ducale de Moulins fut l’un des centres culturels les plus en vue du royaume. A la mort du duc, l’héritage des Bourbon revint à Suzanne, fille unique de Pierre II et d’Anne de France. En 1505, Suzanne de Bourbon épousa son cousin, Charles de Bourbon-Montpensier. (ci-dessus : détail d'une huile sur bois de Jean Hey (généralement identifié comme étant le fameux Maître de Moulins), Pierre II de Bourbon présenté par Saint Pierre, 1492, Musée du Louvre)

Lorsque Suzanne de Bourbon mourut en 1521, l’administration royale de François Ier, poussée par sa mère Louise de Savoie (la littérature romantique en fit d’ailleurs une amoureuse éconduite du beau Connétable), lança une offensive juridique afin de récupérer une partie des possessions de la défunte duchesse. En 1523, un arrêté du Parlement de Paris mit sous séquestre tous les domaines en litige. Cette décision précipita l’issue du conflit. Le 7 septembre 1523, le Connétable de Bourbon quitta ses terres et s’enfuit à Besançon où il se mit au service de l’Empereur, le rival du roi de France. Le duc Charles III fut tué lors du siège de Rome en 1527, ses terres furent définitivement confisquées la même année et rattachées à la Couronne en 1531. (ci-dessus : Portrait du Connétable de Bourbon, gravure du XVIe siècle, anonyme, BNF).
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S. HUG

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