vendredi 13 septembre 2013

La bénédiction des cloches d'Arfeuilles (1919)


  
Il fallut attendre 1994 pour que la culture campanaire des campagnes d'autrefois trouve enfin son historien en la personne d'Alain Corbin, auteur d'une remarquable étude intitulée Les Cloches de la Terre, parue aux Editions Albin Michel. Signaux communautaires de réunions, de communions et parfois de révoltes, on conférait aux cloches de l'ancienne France des vertus quasi magiques : à la fois protectrice des récoltes, des cheptels et du finage de la paroisse, leur son pouvait tenir à distance l'orage, la grêle et la tempête. Le 10 août 1919, la très pratiquante paroisse d'Arfeuilles, procéda à la bénédiction de trois nouvelles cloches, acquises grâce à l'action énergique du chanoine Jouannet, qui vinrent s'ajouter aux deux déjà existantes. Les rues d'Arfeuilles pavoisées pour l'occasion accueillirent une foule considérable. Chacune de ces cloches porte sur sa robe de bronze une prière particulière qui correspond parfaitement aux attentes de la société rurale de ce temps. Sur la première fut gravée : "Je sonne le souvenir. Ma voix pieuse et tendre se fait suppliante auprès de Dieu pour tous ceux que vous avez aimés. Priez pour moi." Sur la seconde : "Je sonne la Paix. Ma voix douce et grave réjouira la terre et descendra comme une bénédiction sur les semailles et les moissons." Enfin, sur la dernière, plane encore de nos jours l'ombre de Verdun et de la Der des Ders : " Je sonne la victoire de la France, la reconnaissance des paroissiens d'Arfeuilles au Sacré-Coeur de Jésus."

S. HUG 



jeudi 12 septembre 2013

L'affaire du colis sanglant (1893)

Au mois de mars 1893, une lugubre découverte fut faite à la gare de Lyon-Perrache, par l’employé chargé de la réception des colis-postaux. A l’arrivée du train de 5 h 50, venant de Roanne, l’employé remarqua un paquet à demi-défait. Il le saisit pour rattacher les liens qui l’entouraient et vit alors passer à travers le papier-carton déchiré un bras d’enfant. Il porta ce colis au bureau du commissaire de police. On en retira le corps d’un enfant de sexe masculin. L’enfant avait dû naître viable ; la mort paraissait être le résultat d’un crime. Le colis était adressé à l’hospice de la Charité ; au-dessous de l’adresse l’expéditrice avait écrit ces mots : « Catherine Prosper prie les sœurs de la Charité de lui conserver ce paquet jusqu’à son retour ». D’après les timbres apposés sur les étiquettes on se rendit compte que le colis avait été expédié de la gare de Roanne. Le petit corps fut transporté à la morgue en attendant que le docteur Lacassagne en ait fait l’autopsie. Le dimanche matin, les journaux de Lyon firent connaître cette affaire à la population roannaise. Le colis était parti de Roanne samedi, par le train de 2 h 51 du soir. C’était une femme qui l’avait apporté à la gare et c’était l’employé de la grande vitesse, Monsieur Denis, qui l’avait réceptionné. Cet employé interrogé, déclara que l’expéditrice était une femme paraissant âgée d’une quarantaine d’années et qui était vêtue de noir. Elle lui dit qu’elle venait de Villemontais, mais fit inscrire Dompierre (Allier) comme étant son domicile. Quant à la nature du paquet, elle déclara qu’il contenait des provisions de bouche. Il n’était du reste pas très volumineux ; pesait quatre kilos et mesurait 50 centimètres de longueur. Rien dans la tenue de la femme ni dans son attitude n’éveilla l’attention de monsieur Denis. Sur les renseignements qui lui on été fournis, le parquet de Roanne a ouvert une enquête de concert avec la police. Pour l’aider dans ses recherches, on lui a envoyé les linges et le papier qui enveloppaient le cadavre. Les linges se composaient d’une pièce de molleton rouge et d’une taie d’oreiller, marquée d’une croix rouge. On communiqua au parquet le rapport du docteur Lacassagne et la lettre de l’expéditrice à la Mère Supérieure des Sœurs de la Charité. Le rapport du médecin-légiste conclut que l’enfant était né viable et qu’il était mort asphyxié. Il ne portait pas de trace de blessure. Il n’avait reçu aucun soin, il n’avait pas été lavé et le cordon ombilical n’avait pas été lié. Dans sa lettre, adressée à la Charité, l’expéditrice disait qu’elle était née à Lyon, que pour faire ses couches elle avait du quitter son mari qui la brutalisait, que faute de ressources elle s’était mise en route à pied et qu’elle avait accouché, jeudi de l’autre semaine, dehors et sans le secours de personne. Elle ajoutait que son enfant était mort faute de soins, qu’il fallait que son nom restât inconnu à cause de son mari et qu’elle se dirigeait sur Paris. Les premières recherches restèrent vaines. L’enquête commencée à Roanne continua dans le département de l’Allier, d’où disait venir l’expéditrice. Ce fut à La Palisse que cette dernière fut découverte. A la nouvelle de la lugubre découverte, les langues allèrent bon train dans cette ville et la rumeur publique accusa de suite une veuve Jounet, cuisinière de son métier, que l’on savait enceinte et qui pendant quelques temps, avait disparu. Un jour on l’avait revue débarrassée et on n’avait pu avoir aucune nouvelle de son enfant. Les bruits du public allèrent aux oreilles du Juge de Paix. Celui-ci fit appeler la veuve Jounet, l’interrogea et finalement, put lui arracher des aveux complets. Elle avait accouché et, pour cacher sa faute, pour se soustraire aux commérages des personnes qui la connaissaient et qui l’avaient plus d’une fois plaisantée sur sa grossesse, elle avait résolu de faire disparaître son enfant. Elle l’avait étouffé une heure après sa naissance et, enveloppant son cadavre dans une pièce de molleton rouge, une taie d’oreiller et du papier gris, elle l’avait apporté à Roanne et l’avait expédié de la gare de cette ville à la Charité de Lyon. Quand on lui a demandé pourquoi elle avait choisi ce moyen pour faire disparaître le corps du nouveau-né, elle répondit que, prise de remords après son crime commis, elle avait voulu se racheter en partie de sa faute en confiant son cadavre à la supérieure de la Charité, qui, elle, pourrait lui donner une sépulture convenable. La veuve Jounet fut arrêtée et immédiatement écrouée.(Source : Le Progrès de Lyon)

S. HUG

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mercredi 11 septembre 2013

La séparation de l'Eglise et de l'Etat à Isserpent

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L'application pleine et entière de la loi de Séparation de l'Église et de l'Etat promulguée en 1905 fut soumise au jeu subtil des équilibres régionaux et locaux. L'inventaire des biens de l'Église et des communautés religieuses, lancé en 1906, faillit mettre en péril l'unité de la nation . Ainsi, dans l'Ouest et le Nord du pays, Blancs et Rouges en vinrent aux mains sur le parvis des chapelles ou aux portes des presbytères. A La Palisse, la municipalité radicale-socialiste du Docteur Baudon profita de l'Affaire des inventaires pour "laïciser" la vie lapalissoise : des croix de carrefour furent déplacées ou disparurent purement et simplement du paysage, on cadenassa également un temps les portes de la chapelle du vieil l'Hôpital de la ville. Mais ce fut à Isserpent que la crise culmina dans le Pays lapalissois.

La municipalité de Francisque David (maire de 1904 à 1912) étant fermement décidée à récupérer le presbytère pour le reconvertir en succursale postale demanda au curé de la paroisse, Auguste Meilleroux (curé de 1900 à 1913) de quitter les lieux. Ce dernier refusa et le jour tant redouté de l'inventaire, le 18 mars 1907, il s'enferma dans l'église. Un forgeron fut alors appelé afin de briser la serrure de la porte du fond de la nef. Le curé Meilleroux décida immédiatement de quitter la bourg et alla s'installer au hameaux des Corres où une grange appartenant à la famille Talabart fut aménagée en église de fortune. On raconte que les cafetiers d'Isserpent firent grise mine car leur clientèle dominicale avait désertée leur zinc... Une intervention de l'évêché permit d'applanir les dernières difficultés et tout rentra dans l'ordre à la fin de l'été. Le curé Meilleuroux regagna alors son presbytère mais cette fois-ci en tant que simple locataire.
L'église "romaine" (restée fidèle au Concordat de 1801) des Corres


S. HUG


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