mercredi 24 juin 2015

Le boeuf gras en Bourbonnais

Défilé du Boeuf gras à Lurcy-Lévis avant la Grande Guerre
Jusque dans l'entre-deux-guerres, à l'époque du Carnaval, il était coutume de faire défiler en ville un boeuf gras acheté par les bouchers. Symbolisant à la fois l'arrivée prochaine du printemps et l'hiver finissant, le boeuf villé (c'est-à-dire "promené en ville") ou boeuf viellé (accompagné au son d'une vielle, comme le voit sur la photo ci-dessus) était pour certains une promesse de bombance à l'entrée du carême. Une fois abattu et débité, le boeuf gras était destiné à la consommation des malades qui étaient dispensés de faire maigre. 

Le boeuf gras à Gannat dans les années 1920

S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com

jeudi 18 juin 2015

Louis Lepine : les premiers pas d'un sous-préfet aux champs

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Louis Lépine est né à Lyon le 6 août 1846, fils de Jean-Baptiste, teneur de livres et de Joachime Vegeramo. Après des études secondaires à Lyon et à Louis-le-Grand, il fréquenta les Universités d'Heidelberg et de Berlin, entre 1867 et 1869. Diplômé de la Faculté de Droit de Paris, il s'engagea en 1870 dans la Garde mobile du Rhône et servit comme sergent-major lors du siège de Belfort. Blessé sous une grêle de balles à Bavilliers, il fut décoré de la Médaille militaire pour sa témérité exceptionnelle et renvoyé dans ses foyers le 26 mars 1873. Il s'établit la même année comme avocat à Lyon (profession qu'il exerça jusqu'en 1877) et devint secrétaire de Milhaud, sénateur du Rhône. L'audacieux sergent Lépine entra dans l'administration et en gravit rapidement les premiers échelons. Ce fut à Lapalisse, que Louis Lépine exerça ses premières responsabilités en tant que sous-préfet (30 décembre 1877 - 28 mars 1879). Dans ses mémoires, Mes souvenirs, Lépine écrivit :
"J'y arrivai sans m'annoncer. Ce n'était pas un El Dorado : à 4 kilomètres de la gare, 1500 âmes agglomérées sur les bords d'un ruisseau, la Bêbre : un relai de poste qui a survécu aux diligences. Au centre du pays, un hôtel ou mieux une auberge. J'y entrai prendre mon premier repas sur une table écartée. Puis je gravis la colline en contournant les soubassements du vieux château de La Palisse, une imposante façade récemment restaurée. La sous-préfecture occupait avec l'église un des côtés du champ de foire. Cela avait dû être une grange, et bien qu'aménagée ce n'était pas encore une habitation confortable, mais c'était propre et il y avait par derrière le classique jardin du curé.

Qu'avais-je à faire dans ce port de mer ? d'abord me documenter; j'entrai donc dans le bureau du secrétaire, un septuagénaire voûté, un profil en casse-noisette, qui mériterait un croquis et je le fis longuement causer. A la suite d'une agitation locale, c'était en 1858, dans le remous de l'attentat d'Orsini, la commission mixte de l'Allier avait décimé le parti républicain. Par fournées on avait expédié les condamnés à Lambessa. Mais ils en étaient revenus la rage au coeur. Le 16 mai avait rafraîchi ces souvenirs parce que mon prédecesseur avait eu la main rude. Comment endormir ces rancoeurs ? Heureusement le député était homme à m'y aider plutôt. Le professeur Cornil était un savant distingué dont un traité sur la tuberculose avait fait la réputation. C'était un collègue et un ami de mon frère. (...) A La Palisse même le conseil municipal était aux mains des royalistes. Mais je pensais trouver la campagne plus malléable et je mis à courir les communes, à conseiller les maires sur les affaires, ce qui était le meilleur moyen de les apprendre. Ils me rendirent mes visites et la glace fut rompue. Le vendredi, jour du marché, je faisais mettre au feu une gigantesque daube, des montagnes de carottes, sans parler d'autres victuailles, et dès 8 heures du matin, tout le jour, je tenais table ouverte où qui se présentait trouvait place. En quittant le foirail, les maires entraient chez moi les sabots à la main, venaient me dire un petit bonjour et allaient s'asseoir à côté des autres. Je faisais concurrence à l'hôtel Sainte-Catherine et sauf l'hôtel tout le monde était enchanté."

Sous-préfecture de Lapalisse 

Lors de son passage à la tête de la sous-préfecture de Lapalisse, Louis Lépine fit état de réelles qualités d'administrateur que le député de l'Allier, Mony, mit en avant pour soutenir sa demande de promotion : "M. Lépine est un excellent sous-préfet, depuis un an qu'il est à Lapalisse, sa compétence dans toutes les questions administratives, son zèle, son aptitude, le tact dont il a fait preuve en maintes occasions délicates, son intelligence et j'ajoute, son talent, de parole, le désignent pour l'avancement. Il n'est assurérement pas à sa place dans une sous-préfecture de 3 eme classe et il a l'étoffe d'un excellent préfet."


Après avoir occupé divers postes préfectoraux en province, Louis Lépine fut nommé préfet de Seine-et-Oise en 1893. Mais suite à la démission de M. Lozé, alors Préfet de Police de Paris, Louis Lépine fut appelé dans la capitale au bout de quelques jours seulement. En 1897, il fut nommé Gouverneur général de l'Algérie avant de réintégrer définitivement la Préfecture de Police parisienne en 1899.
En décembre 1901, il créa la première exposition de jouets et d'articles de Paris qui prit, l'année suivante, l'appelation de Concours Lépine. Ce fameux concours qui se perpétue encore de nos jours a pour but d'encourager et de récompenser la créativité et l'inventivité mises au service des Arts et de l'Industrie. Membre de l'Académie des sciences morales et politique, le célèbre préfet de police parisien décéda à Paris le 10 novembre 1933


S. HUG

HUGSTEPHANE@aol.com

mercredi 3 juin 2015

Un député-maire lapalissois : Jean-Baptiste Baudon




BAUDON Jean-Baptiste

(Châtel-Montagne 1869 - Lapalisse 1956)

Chevalier de la Légion d'Honneur

Maire de Lapalisse de 1907 à 1919

Député de l'arrondissement de Lapalisse de 1914 à 1919
Médecin, Place de l'Industrie

Jean-Baptiste Baudon, personnage populaire, réussit dans la tourmente politique des premières années du XXe siècle, à installer pour près de quarante ans le radicalisme à l'Hôtel de Ville. Son élection à la députation en avril 1914 souleva un immense espoir que la guerre dissipa très vite.
Issu d'une famille de propriétaires terriens de Châtel-Montagne, Jean-Baptiste Baudon fit des études de médecine à Paris où il fut reçu docteur en 1897. L'année suivante, il s'installa Place de l'Industrie à Lapalisse. Ses débuts en politique sont relativement rapides puisqu'en 1904, dans un climat très tendu marqué par l'opposition entre Républicains et Radicaux, il devint conseiller municipal. En octobre 1907, il mena à la victoire une liste radicale-socialiste lors d'élections municipales provoquées par la démission en bloc des conseillers républicains. Le 22 octobre, Jean-Baptiste Baudon était élu maire de Lapalisse. Réélu en 1908, Jean-Baptiste Baudon remporta un beau succès au renouvellement municipal de mai 1912 en triomphant au premier tour une éclatante victoire face au député de la circonscription, Charles Dumas, Républicain radical, qui s'était présenté aux élections municipales de Lapalisse. La liste Baudon obtint 20 sièges sur 21.
Durant les sept premières années de son mandat, Jean-Baptiste Baudon se montra un défenseur acharné du processus de laïcisation de la société, supprimant au passage quelques croix trop visibles dans le vieux Lapalisse et cherchant à réduire l'influence des institutions catholiques de la ville. Jean-Baptiste Baudon chercha également à moderniser Lapalisse en lui donnant un habillage architectural digne de son rang de sous-préfecture. Il soutint ainsi la construction d'un Hôtel des Postes dans l'ile Saint-Jean (1909), d'une Ecole primaire de Garçons (1910), d'une Recette des Finances (1912) et lança les travaux de la future caserne de gendarmerie et du nouvel Hôpital (1913).
Soutenu par les Radicaux de Vichy-Cusset, Jean-Baptiste Baudon fut désigné pour représenter ce parti aux élections législatives d'avril 1914. Le docteur de la Place de l'Industrie axa sa campagne autour de trois points précis : l'établissement d'un impôt sur le revenu, la défense de l'Ecole laïque et le refus du maintien de la représentation proportionnelle aux élections législatives. A la surprise quasi générale, il remporta ces élections au premier tour face au député sortant, une vieille connaissance, Charles Dumas, par 11 960 voix contre 10 928. Durant les quatre années de guerre, Jean-Baptiste Baudon partagea son temps entre son cabinet de la Place de l'Industrie,les blessés en convalescence au château de La Palice, sa famille (son épouse d'origine belge, Marie-Léontine Vanalderweireld, sa fille, Marthe, et son fils, Jacques, futur gynécologue-obstétricien de renom qui eut d 'ailleurs comme interne au sein de son service du Centre hospitalier de Clermont-Ferrand le futur docteur Grèze ), son travail de député aux quatre coins de la circonscription et au palais-Bourbon, sans oublier les fréquentes missions parlementaires sur le front.
Las de la vie politique, Jean-Baptiste Baudon décida de ne pas solliciter le renouvellement de ses mandats de député et de maire lors des élections de la fin de l'année 1919. Un jeune avocat parisien, Lucien Lamoureux le remplaça comme député, son fidèle adjoint à la Mairie, Auguste Coche, fut, quant à lui, élu à la tête de la nouvelle municipalité. Demeurant un personnage écouté dans sa ville et dans l'arrondissement, Jean-Baptiste Baudon continua tout de même à animer les milieux radicaux locaux. Elu simple conseiller municipal de sa commune natale, Châtel-Montagne, en 1935, Jean-Baptiste Baudon en devint maire en 1938 et le resta jusqu'en 1945. Le prestige de l'ancien député, enfant du pays, compta pour beaucoup dans l'élection de notre homme au poste de maire de Châtel-Montagne. Durant son mandat, coïncidant avec les années de guerre, Jean-Baptiste Baudon fut un maire absent qui ne faisait la route de Châtel-Montagne que pour présider les réunions du Conseil municipal. La réalité du pouvoir local était en fait exercée par son premier adjoint, M. Barge (futur maire de Châtel-Montagne). Passé l'épreuve de la guerre, Jean-Baptiste Baudon pratiqua encore quelques années la Médecine tout en passant de plus en plus de temps dans sa propriété châteloise située tout contre le foirail.

S. HUG

(HUGSTEPHANE@aol.com)